Les femmes ont fait leur entrée au Parlement afghan pour la première fois il y a cinquante ans, pendant ce que l’on appelle souvent la «décennie de la démocratie». Mais au cours des années suivantes, marquées par deux coups d’État, des décennies de troubles culturels et religieux, une guerre civile et 15 ans de régime taliban, les portes du parlement leur sont restées fermées.
Après la chute du gouvernement taliban, en 2001, un accord a été signé à la conférence de Bonn pour confier la rédaction d’une nouvelle constitution pour le pays à une commission constitutionnelle. Celle-ci reconnaissait les droits de tous les citoyens afghans, notamment ceux des femmes, maintes fois bafoués par le régime taliban, qui leur interdisait souvent l’accès aux soins de santé et à l’éducation.
Mohammad Ashraf Rasoli, aujourd’hui conseiller auprès du ministre afghan de la Justice, se souvient du débat animé qu’a suscité ce sujet durant la révision du projet de Constitution au Parlement. «Cela a créé beaucoup de controverses, car il y a différentes interprétations de l’islam à cet égard», explique-t-il.
La nouvelle Constitution, adoptée en 2005, comprenait également un quota de sièges parlementaires destinés aux femmes, tant à la Chambre du peuple (chambre basse) qu’au Conseil des anciens (chambre haute). Cette mesure a permis aux Afghanes de jouer un véritable rôle dans les processus décisionnels et législatifs et d’ouvrir, dans une certaine mesure, la voie à l’égalité des genres dans le pays. Aujourd’hui, la loi garantit aux femmes d’occuper deux sièges à la Chambre du peuple par province, soit 27 % des sièges. Selon la Banque mondiale, la part des sièges parlementaires occupés par des femmes est plus importante en Afghanistan que dans la plupart des pays voisins et même dans certains pays développés
Certains considèrent que, sans ces quotas, seule une poignée de femmes se présenteraient aux élections parlementaires à cause de la nature conservatrice de la société afghane et du manque de sensibilisation aux droits des femmes. D’autres estiment qu’il reste de nombreux défis à relever pour assurer la parité des genres et une représentation équitable dans le pays, même si le fait d’accorder aux femmes une place spéciale au Parlement est l’une des plus grandes avancées féministes des deux dernières décennies.
«Malheureusement, il y a encore des problèmes autour du vote pour les candidates», explique Mari Akrami, responsable du réseau Afghan Women’s Network. Et le fait que peu de gens votent pour des députées a un impact sur les droits des femmes dans tout le pays». Des droits qui ont mis des décennies à être conquis et qui, selon elle, pourraient être menacés par les négociations de paix menées actuellement entre le gouvernement afghan et les talibans.
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Cet article est publié dans le cadre de «Towards Equality», une opération de journalisme collaboratif rassemblant 15 médias d’information du monde entier qui mettent en lumière les défis et les solutions pour atteindre l’égalité des genres.
Par Haseeb Bahesh,
Hasht & Subh Daily (Afghanistan)
Quelques pays des partenaires médias
■ En Afghanistan: (classé 71e sur 193 pays analysés par l’ONU en ce qui concerne la parité hommes-femmes au Parlement, les femmes détiennent actuellement 27 % de la Chambre basse et 27,9 % du Sénat ou de la Chambre haute du Parlement. Les femmes occupent 6,5 % des postes ministériels du pays (2 sur 31).
■ En Argentine (classée 18e sur 193 pays analysés par l’ONU en ce qui concerne la parité hommes-femmes au Parlement), les femmes détiennent actuellement 42,4 % de la Chambre basse et 40,3 % du Sénat ou de la Chambre haute du Parlement. Une femme est actuellement présidente du Parlement. Les femmes occupent 18,2% des postes ministériels du pays (4 sur 22).
■ En France (classée 27e sur 193 pays analysés par l’ONU en ce qui concerne la parité hommes-femmes au Parlement), les femmes occupent actuellement 34,8% de la Chambre basse et 12,4 % du Sénat ou de la Chambre haute du Parlement. Les femmes occupent 50% des postes ministériels du pays (9 sur 18).
■ Au Japon (classé 166e sur 193 pays analysés par l’ONU en ce qui concerne la parité hommes-femmes au Parlement), les femmes détiennent actuellement 9,9% de la Chambre basse et 23 % du Sénat ou de la Chambre haute du Parlement. Une femme est actuellement présidente du Parlement. Les femmes occupent 10% des postes ministériels du pays (2 sur 20).
■ Au Liban (classé 183e sur 193 pays analysés par l’ONU en ce qui concerne la parité hommes-femmes au Parlement), les femmes détiennent actuellement 4,7% du Parlement (chambre des députés). Le pays n’a pas de Sénat. Les femmes occupent 31,6% des postes ministériels du pays (6 sur 19).
■ Au Maroc (classé 114e sur 193 pays analysés par l’ONU en ce qui concerne la parité hommes-femmes au Parlement), les femmes occupent actuellement 20,5% de la Chambre des représentants et 11,7% de la Chambre des conseillers. Les femmes occupent 15,8% des postes ministériels du pays (3 sur 19).
■ En Afrique du Sud (classée 12e sur 193 pays analysés par l’ONU en ce qui concerne la parité hommes-femmes au Parlement), les femmes détiennent actuellement 45,8% de la Chambre basse et 41,5% du Sénat ou de la Chambre haute du Parlement. Une femme est actuellement présidente du Parlement. Les femmes occupent 48,3% des postes ministériels du pays (14 sur 29).
■ Au Royaume-Uni (classé 39e sur 193 pays analysés par l’ONU en ce qui concerne la parité hommes-femmes au Parlement, à égalité avec le Cameroun), les femmes occupent actuellement 33,9% de la Chambre basse et 27,9% du Sénat ou de la Chambre haute du Parlement. Les femmes occupent 23,8 % des postes ministériels du pays (5 sur 21).