L’industrie automobile made in Maroc n’a d’autre choix que de négocier le virage de la restructuration et de la transformation digitale de sa chaîne de production... «Motorisations alternatives, voitures électriques, véhicules connectés, usines intelligentes 4.0, éco-conduite, voitures autonomes, implication des Gafam (système Android Auto développé par Google, Apple car Play…) Ce sont là autant d’exemples qui illustrent la transformation radicale de la chaîne de production automobile mondiale afin de répondre aux besoins de connectivité constante des consommateurs», résume une étude de l’Institut marocain d’intelligence stratégique (IMIS) (Think tank dont le rédacteur en chef de L’Economiste, Dr. Mohamed Benabid est l’un des membres cofondateurs).

Plus que jamais, poursuit l’étude, «les mouvements structurants et la crise conjoncturelle que connaît l’industrie automobile sont une occasion propice à la réflexion sur les espaces technico-productifs (organisation des acteurs de la filière et des flux) et les possibilités de valorisation (lieux d’appropriation de la valeur issue de la filière) de ces secteurs stratégiques de l’économie.
Ce qui implique une profonde restructuration des filières industrielles autour des grands marchés de consommation afin de sécuriser l’approvisionnement. L’enjeu est de saisir des gisements d’opportunités de relocalisations régionales et de sourcing made in Maroc.
Autrement dit, le contexte Post-Covid devra offrir de nouvelles perspectives aux industriels marocains dans les chaînes de valeur mondiale. Mais à condition d’anticiper la nouvelle donne et mettre en place les changements qui s’imposent dans les chaînes et process de production.
Déficit en profils pointus
L’émergence de nouveaux modes de consommation implique de nouveaux process de conception et de construction automobile. Désormais, dans les marchés matures et les pays émergents, la tendance est au covoiturage, au copartage, à la location avec option d’achat... Autant de facteurs qui viennent redéfinir aussi bien les process classiques d’acquisition et de financement de voitures que les modalités de conception et de fabrication ou encore la notion même de mobilité.
Ceci dit, les industriels n’auront d’autre choix que de revoir non seulement les process mais aussi leurs modalités d’approvisionnement. De surcroît, le contexte actuel (Covid-19) dicte de nouvelles règles d’approvisionnement. Ce qui passe par le raccourcissement des circuits afin de sécuriser les flux des matières premières et composants des constructeurs européens. D’où la tendance aux relocalisations régionales de l’Asie vers l’Europe. Plus encore, le secteur automobile mondial connaît une phase de refonte de sa chaîne de valeur avec un basculement de la demande et de l’offre mondiale vers les pays émergents. Selon une étude prospective du cabinet Euler Hermes, «95% de la croissance attendue du marché de l’automobile à horizon 5 ans proviendra des marchés émergents, et en particulier de la Chine (47%) et de l’Inde (13%)».
Aujourd’hui, tous ces changements recèlent des opportunités illimitées pour le Maroc, puisque le Royaume pourrait tirer profit du repli des exportations chinoises, sud-coréennes... Sous la même hypothèse de relocalisations régionales, «le sous-produit carrosserie et bodies for motor cars peut présenter une réelle opportunité pour le Maroc vu la part relativement importante de la Chine (10%) et de la Russie (8%) en tant que marchés fournisseurs de la France et compte tenu de la part du Maroc (2%) qui témoigne de la maîtrise de cette production», recommandent les experts IMIS. Autre source d’opportunités, la totalité des châssis produits au Maroc est absorbée par le marché français (100%).
La diversification des marchés d’exportation devrait multiplier les débouchés pour le made in Maroc. Sauf que jusque-là, «ce potentiel des marchés est insuffisamment exploré». Autre bémol, RH cette fois-ci: «Malgré la mise en place de dispositifs de formation au Maroc, le déficit de profils pointus demeure persistant, notamment les profils en relation avec les segments à développer (R&D, plasturgie, emboutissage, système de sécurité…).
Par ailleurs, l’accès au financement reste une entrave majeure au développement des entreprises. Bien qu’une commission «Développement du financement » ait été mise en place par l’Amica afin de hisser les investissements en proposant des offres de solutions financières, l’accès au financement demeure problématique, surtout pour les PME, précise l’étude.
Quoi qu’il en soit, la plateforme de production marocaine a de nombreux atouts: Premier secteur exportateur au Maroc depuis 2014, l’industrie automobile a représenté 83,4 % du total de la production en Afrique du Nord en 2019, faisant du Royaume le 2e producteur de véhicules à moteur et le 1er producteur de voitures touristiques du continent. Par ailleurs, la production marocaine de l’automobile a représenté 83,4% du total de la production en Afrique du Nord (Algérie, Egypte, Maroc) en 2019.
Analyse Swot

- Baisse des perspectives du marché européen
- Rapatriement de la production européenne

- Accès au financement problématique, surtout pour les PME
- Manque d'expertise en matière de R&D et de la conception qui entrave le progrès dans la chaîne de valeur
- Déficit de compétences, des ingénieurs, cadres intermédiaires et techniciens

- Stabilité politique et macroéconomique
- Politique d'ouverture économique et commerciale (ALE)
- Complémentarités avec certains pays de l'Afrique du Nord
- Des progrès au niveau des infrastructures

- Réagencement de la production à l'échelle régionale
- Demande mondiale en mutation vers les pays émergents
- Marché africain en croissance
Amin RBOUB
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