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Au Brésil, la lutte contre la violence conjugale passe par les salons de beauté

Par Angela Boldrini | Edition N°:6037 Le 22/06/2021 | Partager

Lus de 68.000 cas de violence conjugale ont été signalés au Brésil en 2017. Et ce n’est que la partie visible de l’iceberg, car seuls 10% des victimes de violence domestique dans le monde déclarent les faits à la police, selon l’ONU.

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Des esthéticiennes de Jacques Janine, un salon haut de gamme de São Paulo, en train d’être formées pour mettre fin à la violence domestique dans le cadre du projet Mãos Empenhadas Contra a Violência en 2019 (Ph. Julia Zaremba/Folhapress)

Afin de lutter contre ces violences sexistes, la même année, une action sans précédent contre la violence sexiste a été lancée dans l’État brésilien du Mato Grosso do Sul, dans le centre-ouest du pays.

Le programme Mãos Empenhadas Contra a Violência (Mains engagées contre la violence), du département de la justice de l’État, a commencé à former les professionnels des salons de beauté aussi bien pour identifier les signes d’abus chez leurs clientes, que pour encourager ces dernières  à signaler le crime et demander de l’aide.

A ce jour, cette initiative a permis de former 272 esthéticiennes dans la ville de Campo Grande et a été répliquée dans sept autres villes de six États différents du Brésil. Aujourd’hui, elle est aussi implémentée pour la première fois dans les barbershops, ou salons de coiffure pour les hommes.

Si dans les salons de beauté l’objectif est d’aider les victimes, dans les barbershops, il s’agit de prévenir la violence en s’adressant à ceux susceptibles de commettre des abus. Les deux premières formations pour les barbiers ont eu lieu au cours du second semestre de 2020 et en ligne, en raison de la pandémie de coronavirus. Pendant le confinement, les signalements de violence conjugale sur les réseaux sociaux ont augmenté de 431%, selon le Forum brésilien sur la sécurité publique. Les féminicides, eux, ont augmenté de 2% au cours de la première moitié de 2020 par rapport à la même période en 2019.

Renan Silveira, barbier au salon de coiffure Campo Grande Barber Shop, a participé à la session de formation du programme destiné aux hommes. «On s’est dit que c’était très cool d’apporter ce type d’information au salon de coiffure, où il peut souvent y avoir une ambiance très “macho”», explique-t-il.

«Le projet est axé sur l’éducation, car il y a encore des femmes qui pensent qu’elles commettront un crime si elles quittent leur agresseur; à savoir, l’abandon de domicile conjugal, qui n’est pas un crime», explique la juge Jacqueline Machado, fondatrice du programme. Jusqu’à présent, dit-elle, les manucures et les coiffeuses qui participent à l’initiative ont aidé 63 femmes à signaler des cas de violence domestique à la police – un chiffre qui pourrait être bien plus élevé, car souvent les victimes ne font pas référence au programme lorsqu’elles portent plainte. Ensemble, les 50 salons de beauté partenaires peuvent sensibiliser près de 22.000 clientes chaque mois.

Mais le programme a ses limites, alerte l’avocate féministe brésilienne Isabela Del Monde, car de telles initiatives, même si chargées de bonnes intentions, ne peuvent remplacer des politiques publiques plus solides. «C’est beau de sauver la vie d’une femme, mais qu’en est-il des autres millions qui existent?» s’interroge-t-elle. «La réponse doit être structurelle».

                                                                               

La violence domestique dans le monde

■ Une femme sur trois dans le monde subit des violences physiques ou sexuelles -le plus souvent par un partenaire intime, mais pas seulement-, selon les données de l’ONU. Si l’on tient compte également du harcèlement sexuel, ce chiffre est encore plus élevé.
■ 27% des femmes âgées de 15 à 49 ans qui ont été en couple déclarent avoir subi une forme de violence physique et/ou sexuelle de la part de leur partenaire intime.
Si les hommes sont le plus souvent les victimes des homicides, ce sont les femmes et les filles qui sont tuées le plus souvent par des membres de leur famille ou des partenaires intimes: Du total des victimes d’homicides en 2017, à l’échelle mondiale, 80% étaient des hommes et 20% des femmes, mais sur la totalité des homicides commis par des partenaires intimes, 82% des victimes étaient des femmes, et 18% des hommes.  
Dans la majorité des pays pour lesquels des données étaient disponibles en 2015, moins de 40% des femmes victimes de violences cherchent à obtenir de l’aide.
Il est estimé que la violence à l’égard des femmes coûte aux pays jusqu’à 3,7% de leur PIB, soit plus du double de ce que la plupart des gouvernements dépensent pour l’éducation.
Une étude du Fonds des Nations unies pour la population, publiée en avril 2020, estime qu’il y a eu une augmentation de 20% des incidents de violence domestique dans les 193 États membres de l’ONU pendant les confinements liés à la pandémie de Covid-19 en 2020.

Par Angela Boldrini (Brésil)

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Cet article est publié dans le cadre de «Towards Equality», une opération de journalisme collaboratif rassemblant 15 médias d’information du monde entier qui mettent en lumière les défis et les solutions pour atteindre l’égalité des genres.