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«Des ambassadrices du solaire» au service de la transition énergétique

Par Mohamed Ali Mrabi | Edition N°:6036 Le 21/06/2021 | Partager

Au Maroc, un programme de formation en gestion et commercialisation de fours et cuiseurs solaires accompagne des femmes en milieu rural  dans la création de leurs propres coopératives. Objectif : contribuer au développement inclusif et climato-résilient des territoires et favoriser l’égalité des genres.

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20 jeunes techniciennes de la région marocaine du Souss-Massa ont bénéficié d’une formation à la fabrication des cuiseurs solaires. Traditionnellement, le bois et le gaz sont utilisés, particulièrement dans le monde rural, pour la cuisson, en dépit de leur impact négatif sur la santé des personnes et sur l'environnement (Ph. WECF)

onstruire avec des femmes un monde durable et leur permettre d'améliorer leurs revenus et leurs conditions de vie, c'est l'objectif du projet Faredeic (Femmes Arganières et Rurales Engagées pour le Développement Economique Inclusif et le Climat), actuellement en cours au Maroc. Lancé en 2019, ce projet est mené par le réseau international Women Engage for a Common Future (WECF, un réseau international d’organisations féminines et environnementales) et ses partenaires locaux, l’Association pour les Energies Renouvelables et le Développement Durable (AERDD), la Fondation Mohammed VI pour la Recherche et la Sauvegarde de l’Arganier (un arbre endémique local, et le deuxième le plus abondant au Maroc) et le REMESS (Réseau Marocain de l'Economie Sociale et Solidaire).

Objectif : développer une filière d’énergie renouvelable locale par la création de coopératives féminines d’énergie, qui fabriqueront des solutions solaires simples et abordables telles que des cuiseurs, des séchoirs et des fours. Car ce sont précisément les femmes qui souffrent le plus des effets néfastes du dérèglement climatique, selon nombre d’organisations internationales dont l’ONU, et pourtant, elles sont bien souvent peu prises en compte dans la réponse à cet enjeu majeur. Le projet, d'une durée de trois ans, a nécessité la mobilisation de 840.000 euros (un million de dollars), dont 380.000 euros sont financés par l'Agence française de développement (AFD). Le reste du financement est pris en charge par l’Agence française de la transition énergétique (ADEME) et la Fondation de France.

Concrètement, ce projet concerne 600 femmes. Celles-ci seront sensibilisées, à travers des sessions et des rencontres d'explication et de sensibilisation aux avantages de la transition énergétique et de l'utilisation des technologies vertes. Parmi ce nombre, seule une quarantaine des dirigeantes de coopératives devra se lancer dans la fabrication de solutions simples et surtout éco-responsables, dédiées aux structures de production agricole, d'huile d'argan ou encore halieutiques. Deux régions sont couvertes: Tanger-Tétouan (dans le Nord du Maroc) et Souss-Massa (dans le Sud), une zone durement touchée par la crise climatique, mais qui jouit cependant d’un taux d’ensoleillement exceptionnel (plus de 300 jours par an).

A la fin du programme, prévue dans quelques mois, 40 jeunes techniciennes seront formées également aux technologies solaires thermiques. Les meilleures d'entre elles seront accompagnées pour la création de leurs coopératives. Elles bénéficieront d'actions de renforcement des capacités en matière de gestion et de production durable, dédiées aux entreprises rurales.

Découpe, assemblage, montage

Dans les détails, si le projet est lancé en 2019, les premières formations de fabrication de cuiseurs solaires ont démarré fin 2020, menées en partenariat avec la société française Four Solaire Développement (FSD) et l'Institut national de l'énergie solaire (INES).

Malgré la crise sanitaire et les nécessités d'adaptation aux mesures mises en place, les formateurs et partenaires de FSD et de l’INES se sont rendus dans les deux régions.  «Les femmes ont eu droit à des sessions pratiques de découpe, d'assemblage et de montage du matériel, en plus d'apports théoriques sur l'énergie solaire, son utilisation et ses avantages», indiquent les responsables de l’INES. Dans la région de Tanger-Tétouan, 18 jeunes techniciennes ont été formées lors de ces sessions. Dans le Sud, cette première étape a ciblé des formateurs de l'OFPPT (Office de la Formation Professionnelle et de la Promotion du Travail). Ces derniers seront chargés par la suite de la formation de 20 jeunes femmes.

Confitures, viande et tajines dans les cuiseurs solaires

«L’enthousiasme et la bonne humeur étaient au rendez-vous pour cette semaine couronnée de succès, qui s’est soldée par la fabrication d’une dizaine de cuiseurs et une session de démonstration de leur utilisation, avec cuisson de confitures, viande et tajines», selon le WECF. La 2e phase, lancée en mars et avril derniers, a porté sur la formation d'un autre groupe de femmes rurales à la fabrication des cuiseurs solaires, dans les deux régions. Les jeunes techniciennes ont acquis des compétences en matière de découpe des éléments du cuiseur, l'assemblage et le montage, en plus d'apports théoriques sur les techniques de fabrication des cuiseurs, expliquent les promoteurs du projet.

Après ces deux sessions, 10 techniciennes sur les 40 formées dans les régions cibles seront sélectionnées pour devenir «ambassadrices du solaire». Cette opération s'effectuera sur la base  «des retours des jeunes femmes sur leur formation, leur motivation à poursuivre le projet, et sur les résultats obtenus aux tests théoriques». Par la suite, elles seront accompagnées pour la création de leurs propres coopératives pour commercialiser les solutions solaires. Un grand challenge pour ces femmes qui pourront contribuer à la politique de développement durable de leurs territoires.

                                                            

Alternatives durables

Le Maroc est l'un des pays d'Afrique les plus menacés par le dérèglement climatique, avec une pression accentuée sur les ressources naturelles, selon le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC). Actuellement, chaque habitant de ce pays dispose d'environ 600 mètres cubes d'eau par an, contre une moyenne 4 fois plus élevée dans les années 60. D'où l'importance de la mobilisation pour la mise en place de solutions innovantes, favorisant aussi bien la transition énergétique, particulièrement dans le monde rural, que l’inclusion des femmes.
Ces cuiseurs solaires, alternatives durables, contribuent à l’implication et la reconnaissance des femmes dans la transition énergétique, expliquent les initiateurs du programme. Ces derniers misent sur le rôle économique, social et environnemental de ces femmes, actives au niveau des coopératives agricoles ou d'argan, utilisant des techniques ancestrales, respectueuses de l'environnement. Et ce dans un pays où, traditionnellement, on utilise du bois et du gaz pour la cuisson, particulièrement dans le monde rural, en dépit de leur impact négatif sur la santé des personnes et sur l'environnement.

Mohamed Ali Mrabi (Maroc)

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Cet article est publié dans le cadre de «Towards Equality», une opération de journalisme collaboratif rassemblant 15 médias d’information du monde entier mettant en lumière les défis et les solutions pour atteindre l’égalité des genres.