
Pour Aziz Fertahi, président de la CGEM Meknès-Ifrane, «le code des marchés publics doit être revu tous les 4 ans. Dans sa forme actuelle, ce code donne droit à des incohérences et des dépassements dans des marchés qui ne sont pas auditables par force de loi» (Ph. YSA)
Pour leur 2e escale régionale, les députés de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) se sont rendus à Meknès. Leur rencontre de sensibilisation sur l’amélioration du climat des affaires, le modèle de développement économique, et la redynamisation de l’activité économique s’est soldée par une palette de recommandations. Décryptage.
■ Le code des marchés publics est obsolète
Pour Abdelilah Hifdi, président du groupe parlementaire CGEM à la 2e Chambre, «cette rencontre offre une occasion pour les divers opérateurs économiques de la région d’échanger les points de vue et prendre acte des possibilités de débats, propositions de lois, et questionnements aux ministres dont disposent les députés».
Le groupe accorde un intérêt particulier à l’amélioration du climat des affaires et la relance des investissements et la création des postes d'emplois. Pour y parvenir, «une refonte du code des marchés publics datant de 2013 s’impose afin de préserver l’entreprise et l’inciter à respecter les délais», recommande d’emblée Aziz Fertahi, président de la CGEM Meknès-Ifrane. Pour lui, «les délais d’appel d’offres de 21 jours sont corrects, mais il faut mettre fin au CPS modificatifs». A ce titre, le changement répétitif des CPS des appels d’offres en cours de route (avant l’expiration des délais d’appel d’offre) est à bannir. «Il s’agit avant tout d’une question de gestion du temps et de subjectivité», explique Fertahi.
■ Facturation électronique
De l’avis de cet expert en BTP, fondateur du bureau «Labo Route d’essais et d’études», la facturation électronique est un outil important dans les relations entre le secteur privé et le public. «Toutefois, pour améliorer le délai de paiement nous pensons qu’il faut instaurer des lois à cet effet… par exemple exiger du maître d’ouvrage l’exécution de 50% du marché à la limite de l’épuisement de 50% du délai d’exécution. Le cas échéant l’entreprise peut faire les recours nécessaires», explique-t-il.
L’objectif ne permettant la mauvaise interprétation des articles. Il en est de même pour la révision des prix. Pour y parvenir, «un règlement constant et équilibré serait le bienvenu». Car, il permettra de respecter les prix à la soumission. Sur un autre registre, le président de la CGEM Meknès-Ifrane rappelle que «le volume des marchés publics lancés annuellement dépasse les 200 milliards de DH… Il faut protéger ces deniers publics par un cadre légal». En attendant, la gestion des marchés publics au niveau local laisse à désirer. Ceci, du fait que les directeurs provinciaux peuvent lancer des marchés publics à hauteur de 5 millions de DH. Ils élaborent les CPS, annulent ou approuvent les marchés, les exécutent et les liquident à leur guise. «Etant donné que les marchés de moins de 5 millions de DH de budget ne sont pas auditables, ces directeurs échappent à tout contrôle. Ce qui représente une grande lacune au niveau de l’actuel code des marchés, à corriger dans les plus brefs délais», suggère le président de l’Union patronale. Pour lui, il faut préserver les fonds publics avec des textes fiables. Aussi, l’administration doit sérieusement étudier l’âge des marchés, en cours, exécutés, et liquidés. «Certains remontent à 2006, leurs cautions ne sont jamais récupérées. Pire, les agios payés par l’entreprise dépassent la valeur du marché lui-même», déplore le responsable patronal.
■ Réformer la loi
Pour encourager l’investissement, il faut uniformiser l’interprétation des textes de loi. En ce sens, les opérateurs Meknassis affirment «qu’il est des investissements qui sont autorisés par une région et rejetés par une autre sous prétexte qu’ils ne sont pas exécutables ou présentent un effet nuisible sur l’environnement». D’où l’appel à une interprétation juste et légale basée sur des données scientifiques.
D’autres intervenants recommandent l’annulation des cautions pour les marchés publics dont la valeur est inférieure à 100.000 DH. Cette mesure, selon eux, devrait ouvrir la voie à la participation des PME. Mieux encore, la CGEM de Meknès appelle à la création d’une caisse régionale pour appuyer la TPME à hauteur de 30.000 DH. Pour plus d’efficience, la gestion de ce fonds devrait être assurée par un Conseil d’administration de concert avec la CGEM. D’autres opérateurs ont proposé la création d’une caisse pour appuyer les entreprises en difficulté. Octroyés sous forme de prêts, les fonds de cette caisse devraient être remboursés avec un taux d’intérêt très bas.
■ R&D et innovation ne sont pas en reste
Autres recommandations, encourager et financer la recherche et développement (R&D) ainsi que l’entreprise innovante. Ces suggestions n’auraient aucun impact si les banques ne suivent pas en proposant des taux de crédits «raisonnables». Sur un autre registre, Aziz Fertahi réclame la lutte contre la spéculation dans le foncier industriel. Pour lui, il faut revoir la loi régissant les PPP (partenariat public privé) et permettant une spéculation décalée dans le temps. Car, passés 5 ans, le terrain industriel appartient définitivement à son acquéreur. Celui-ci n’est paradoxalement pas obligé d’y construire son unité.
D’autre part, des entrepreneurs s’interrogent sur le mal d’équipement dont souffrent les zones industrielles. En ce sens, la zone dédiée aux activités artisanales, à titre d’exemple, est inaugurée en 2004, mais manque cruellement d’équipements, infrastructures, câblages téléphoniques et électriques. Elle est en plus mal-desservie par le réseau des transports. Enfin, la CGEM a demandé de revoir l’imposition des régions reculées, et Meknès en fait partie. «Il ne faut pas nous mettre sur le même pied d’égalité comme Casablanca, Tanger, Kénitra…», concluent ses membres.
De notre correspondant permanent, Youness SAAD ALAMI
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